
Il faut avoir la couenne dure lorsqu’on grandit à Hamilton, en Ontario. Il faut vivre dans une ville, située à 45 minutes de route au nord de Toronto, qui évolue dans l’ombre de la plus importante métropole canadienne, assister au déclin et à l’effondrement du secteur de l’acier et composer avec les problèmes sociaux qui touchent autant les nouveaux arrivants que ceux qui y vivent depuis toujours. Qu’à cela ne tienne, une communauté culturelle ambitieuse défendant becs et ongles la philosophie DIY a su émerger de ce chaos post-industriel et revitaliser la ville, comme le suggère son slogan Art (is/as) The New Steel, ou l’acier d’hier, c’est l’art d’aujourd’hui.
La scène musicale d’Hamilton compte de nombreuses réussites à son actif, que l’on songe à Crowbar et à Teenage Head, ou à des groupes cultes comme Christmas et Simply Saucer (dont l’album Cyborgs est probablement le meilleur album rock canadien de tous les temps). La dernière décennie a été marquée par un raz-de-marée d’artistes de la scène électronique dont les plus notables sont Junior Boys, Jessy Lanza et Orphx.

La plupart des activités à Hamilton se déroulent dans le centre-ville qui était autrefois décrépit et sont menées par un petit groupe de personnes qui ont décidé de se tenir debout et de tout mettre en œuvre pour que la ville devienne un lieu d’expérimentations. Il est littéralement possible de tout faire Hamilton, et ce, à un moindre coût. Des personnes y ont réussi à concrétiser leurs projets avec très peu de ressources initiales. Vous aimeriez qu’il y ait un bar cool où aller ? Ouvrez-en un (The Brain). Il n’y a pas moyen d’arrêter pour un café sur James St. ? Ouvrez un café (Mulberry St. Cafe). Ça prendrait une salle de spectacle et un espace DIY... HAVN est créé.
Hamilton est une ville qui offre de nombreuses possibilités pour vivre en deçà de ses moyens. Et si elle n’échappe pas à l’embourgeoisement, cela se produit au rythme d’Hamilton; les quartiers prennent plus de temps qu’ailleurs à changer de visage. Cela n’est évidemment pas l’idéal, mais le phénomène progresse ici de façon plus saine en offrant plus d’options inclusives, contrairement à l’« hyperembourgeoisement » que l’on observe dans d’autres villes canadiennes (comme Toronto).
Les résidents d’Hamilton avaient besoin d’habiter leur ville autrement, et ils ont travaillé pour que ce souhait se concrétise. La même éthique de travail préconisée dans la fabrication de cet acier qui a forgé notre ville anime notre vision créative et notre volonté de faire revivre notre milieu autrement. C’est hautement réjouissant et en plus, ça fonctionne. Venez voir par vous-même pourquoi on en fait tout un plat.