Léna Bartels

Dans son deuxième album de chansons rock toujours étranges et brillantes, The Brightest Silver Fish, Léna Bartels écrit souvent entre deux émotions. L’auteure-compositrice-interprète de Brooklyn observe les schémas qui se jouent entre ses narrateurs et les autres, parfois de très loin, parfois de si près que l’on ne distingue que des couleurs dégradées et des mouvements flous. Elle explore les façons involontairement destructrices dont nous exprimons notre intérêt pour les autres – comment la coercition peut sembler inséparable du désir, et comment les gens s’habituent tellement à se sentir dépossédés de leur pouvoir qu’ils en oublient leur propre pouvoir d’action. S’inspirant de l’attitude de l’alt-rock des années 90 et de l’habileté des auteurs-compositeurs-interprètes classiques comme Rickie Lee Jones et Aimee Mann, Bartels modifie audacieusement son paysage musical en fonction des besoins de chaque scène, créant ainsi des images déformées d’un monde hanté et incertain.

The Brightest Silver Fish fait suite au puissant premier album de Bartels, Preservation (2022), et à l’album split sorti cet hiver avec Nico Hedley, It’s Gonna Be a Wonderful New Year. Ses chansons se déroulent dans des moments où les sujets se sentent simultanément piégés dans leur corps et en train de planer quelque part au-dessus de celui-ci, épris et suffoqués, captivés et repoussés, timidement pleins d’espoir mais fondamentalement sceptiques. Bartels évoque ces états conflictuels avec un ton tout à fait singulier, ses flux elliptiques d’images et d’aphorismes étant nuancés par des arrangements imaginatifs et changeants de quatuor rock. Ses personnages semblent poursuivre des idéaux aussi précieux qu’insaisissables, comme le poisson d’argent qui scintille dans l’eau – des choses qui sont exactement ce qu’elles sont, sans ambiguïté, illuminant un chemin scintillant vers un avenir plus inspirant.